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Abstracts

Henrique Jales Ribeiro (Université de Coimbra) : « Bertrand Russell et le positivisme logique »

Il semble que, depuis un essai publié il y a plus de dix ans (Ribeiro 1999), aucune autre étude n'ait été publiée jusqu'à maintenant sur les rapports entre Russell et le positivisme logique dans son ensemble, c'est à dire, depuis les premières influences du philosophe anglais dans ce mouvement (au début des années vingt du siècle dernier) et, en particulier, sur Carnap (cf. Ribeiro 2001), jusqu'à la fin des années cinquante, moment où Russell (1959) a renoncé à poursuivre une activité philosophique. Dans cette intervention, l'auteur reprend de façon optimiste ses propres recherches, en les développant et, plus spécifiquement, en les recadrant dans le contexte actuel des recherches (directes ou indirectes) sur ces relations, en particulier, celles qui concernent l'auteur de Der logische Aufbau der Welt. Sa perspective est polémiquement inchangée. En bref: (1) L'encadrement de base historico-philosophique de ce livre a été possible grâce à l'interprétation néo-hégélienne, de la part de Russell, de l'idée d'une encyclopédie des sciences (cf. Griffin 1991), telle que cette interprétation a été développée par lui depuis la période idéaliste (1895-1899) jusqu'aux Principia Mathematica (1910-1913) et, en particulier, le texte «The Philosophy of Logical Atomism » (1918) ; (2) En dépit de plusieures influencs importantes dans l'Aufbau de Carnap (néo-kantisme et autres courants et auteurs) qui ont fait l'objet d'études ces vingt dernières années, c'est un tel encadrement qui est proto-historiquement à la base de la conception positiviste, dans les années trente, d'une «encyclopédie de la science unifiée» (cf. Carnap 1934; et Ribeiro 2013); (3) Plus tard, dans les années trente et quarante du siècle dernier, Russell fût le premier auteur - anticipant l'historiographie moderne de R. Haller, J. Herman, R. Giere et A. Richardson, M. Friedman, et d'autres- qui analysa et critiqua le positivisme logique, non pas parce qu'il serait réductionniste et vérificationniste (comme Quine 1953 l'argumentera de façon erronée), mais parce qu'il souscrivait une vision holiste de la science, qui conduirait - suivant l'interprétation du philosophe anglais - à la fin de la philosophie de la science dans le sens classique et fondationnaliste du concept (Russell 1940, 1959) ; (4) Ceci dit, on ne peut conclure, aucunement, que Russell fût un positiviste logique (comme A. Ayer et autres ont commencé par suggérer), bien que la thèse que sa philosophie fût à la genèse, en grande partie, de ce mouvement (via Carnap, surtout) soit parfaitement plausible de nos jours.

Henrique Carlos Jales Ribeiro est docteur en Philosophie et professeur associé agrégé de la Faculté de Lettres de l'Université de Coimbra (Portugal), où il coordonne le groupe de recherche «Teaching logic & argumentation» de la «Fondation [Portugaise] pour la Science et la Technologie». Il est l'auteur de trois livres : Pour comprendre l'histoire de la philosophie analytique (2001, trad. du titre original en portugais) ; Bertrand Russell et la philosophie analytique au XXe siècle (2007, trad. du titre original en portugais); et Etudes sur la philosophie en Europe et au Portugal (2013, trad. du titre original en Portugais) ; et éditeur de plusieurs autres, entre lesquels notamment, plus récemment, Inside Arguments : Logic and the Study of Argumentation (2011).

Ghislain Guigon (Université de Genève) : La difficulté de la coextension

Supposez que a, un individu particulier, est F et supposez que a est aussi G. Un cas de coextension se produit quand les deux conditions sont réunies :

Distinction : (a est F( et (a est G( sont des attributions distinctes de propriétés à a.

Coextension : toutes et uniquement les choses qui sont F sont toutes et seulement les choses qui sont G.

Nous pourrions reformuler Coextension en disant que l'extension du prédicat 'est F' est identique à l'extension du prédicat 'est G'. Il y a divers types de cas supposés de coextension : des cas de coextension contingente (toutes les choses qui ont un cœur ont au moins un rein et vice versa mais il pourrait en être autrement), des cas de coextension nécessaire (toutes les choses triangulaires sont trilatérales et vice versa et il ne pourrait pas en être autrement), et des cas de coextension temporaire (supposez que jusqu'à présent toutes les choses rouges furent chaudes et vice versa mais qu'à un instant futur certaines choses rouges sont froides). Les métaphysiques des propriétés doivent rendre compte de tels cas supposés de coextension.

Les cas de coextension constituent une difficulté pour une certaine famille de théories nominalistes des propriétés que je nomme Nominalismes analytiques extensionnels. Les nominalistes analytiques extensionnels sont nominalistes parce qu'ils nient l'existence des universaux ou des tropes. Ils sont analytiques parce qu'ils ont pour but de fournir une analyse des attributions de propriétés. Enfin, ils sont extensionnalistes parce que, selon eux, l'identité d'attribution de propriétés est une affaire extensionnelle : (a est F( = (b est G( si et seulement si a = b et l'extension de 'est F' = l'extension de 'est G'. Parmi les nominalismes analytiques extensionnels, on trouve entre autres les nominalismes de la ressemblance de Carnap et du premier Goodman, le nominalisme des classes et le nominalisme des classes naturelles de David Lewis.

Dans ma présentation, j'expliquerai la difficulté de la coextension, j'expliquerai les différentes solutions possibles à cette difficulté et je développerai et défendrai une solution nominaliste originale à cette difficulté.